Renda ne jouit pas de la réputation de ses consœurs voisines Beida et Tsinghua, elle n'a ni leur (relative) ancienneté, ni leurs moyens. Mais Renmin a quelque chose que les deux autres n'ont pas et qui, en Chine, compte: son histoire est étroitement liée à celle du parti communiste. Fondée en 1937, année où le Japon envahit le pays, elle se vit attribuer le nom d'université du peuple en 1950, un an après la prise de pouvoir de Mao et des siens, comme le rappelle brièvement le site de la faculté.
Les cadres du parti sont issus de ses bancs - imaginaires d'ailleurs sur le campus. L'un de mes professeurs, la trentaine soignée, dit le plus naturellement du monde l'autre jour avoir pris sa carte par intérêt bien davantage que par conviction. Le parti, c'est peut-être triste, n'attire plus les jeunes, mais il est encore utile pour accéder à certains emplois, académiques notamment.
Le barbare que je suis a fini par trouver au campus quelque charme. C'est par la porte Est que je fis mon entrée en ces lieux, un soir gris de septembre. Cette porte massive à l'allure soviétique n'a rien d'accueillant, elle repousserait plutôt.
Mes promenades de ce côté (de Guermantes) m'emmenaient soit dans la bouche du métro, soit au pied de la passerelle enjambant l'avenue où un maître ès brochettes en tous genres régale les palais à la nuit tombée.
De l'autre côté (de chez Swann), la porte Ouest ouvrait vers d'autres horizons culinaires, aperçus plus que réellement touchés du doigt. Cela donnait à ce côté un je ne sais quoi de mystérieux inconnu de l'autre.
Le campus abrite une piscine, des terrains de badminton et de tennis, une piste d'athlétisme, mais le sport le plus pratiqué par les étudiants est le basket-ball, aussi populaire en Chine qu'aux Etats-Unis.
Non loin de là, au centre du campus, se situe la "place Tiananmen" de Renda, dotée d'une pelouse et moins grande que la vraie! En septembre dernier, le président Hu Jintao en personne vint à Renda. Pas de discours ni de cérémonie interminables, mais le bonheur simple d'un bain de foule estudiantin. Il était impressionnant de voir ces étudiants fous de joie, ne se contenant plus, criant, sautillant afin de prendre en photo le chef suprême. Toute cette déférence à l'égard du Président fit songer au barbare que le changement, s'il devait avoir lieu, ne viendrait sûrement pas de la jeunesse.
Avec la pratique du basket-ball, un autre trait caractérise les étudiants chinois: ils sont studieux. Ou, du moins, ils affectent de l'être. Toujours est-il que la tombée de la nuit ne les arrête pas.
Renda, on l'a dit, n'est pas la plus cotée des universités pékinoises. Cela ne l'empêche pas pour autant de se donner des airs d'Ivy League. En tout cas d'essayer.
Pris dans son ensemble, le campus de Renda n'a pas non plus les attraits de celui de Beida. Mais certains détails sont amusants. Il suffit de lever les yeux.
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